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bâtiments voisins, occupés par la prison et la gendarmerie. Nulle part on ne trouva trace du jars ; personne, qui plus est, ne put dire ce qu’il était devenu.

— L’est sorcier ! L’est sorcier ! répétait Rosalie dans son patois de Moncontour, Y a pas ! L’est sorcier !…

Telle fut la perturbation dans laquelle cet événement jeta Madame la Principale qu’elle fut sur le point d’écrire aux époux Lespérut pour s’excuser, en raison de la catastrophe qui venait de frapper sa basse-cour, de ne pouvoir accepter le dîner auquel ils l’avaient priée. Très sagement, M. Lefur, qui avait gardé quelque sang-froid, représenta à sa femme combien cette décision serait fâcheuse, qu’elle ne remédierait point à la disparition du jars et qu’en définitive elle ne ferait qu’ajouter une perte à une autre. Les Lespérut s’étaient fait assez tirer l’oreille pour leur rendre ce dîner ; on le tenait, il ne fallait pas le lâcher.

Madame Lefur se rendit à ces raisons, non pourtant sans avoir épuisé tous les moyens que lui suggéra son expérience pour retrouver la piste du fugitif. Elle poussa le scrupule jusqu’à envoyer un exprès à Kerguignou avec mission de s’informer si le jars, d’aventure, n’avait pas rallié dans la nuit la ferme de la veuve Manégol ; on avait cité à Madame Lefur maints exemples de palmipèdes atteints de nostalgie et retrouvés après plusieurs jours dans leur poulailler natal. Mais, à Kerguignou, non plus que dans aucune des mai-