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Je ne sais plus très bien comme les choses s’arrangèrent et si Prosper et Kermaho finirent par s’expliquer. J’ai recueilli sur cet incident, de la bouche de mes anciens condisciples, des versions très différentes. Pour moi qui, n’étant que simple historien, ne suis garant que de la vérité des faits que je raconte, je laisse au lecteur à leur donner le dénouement qu’il préférera. Mais je l’avertis que ce dénouement ne saurait être cherché dans la confusion de Bobinet qui sut toujours tirer son épingle du jeu et montra par là, même dans ses inventions le plus téméraires, toute la souplesse et l’extrême fertilité de son heureux génie.

L’aventure, en tout cas, ne le brouilla pas avec Prosper. Le professeur et l’élève étaient dignes de s’entendre. Bobinet rachetait sa faiblesse en latin par l’étendue de ses connaissances en histoire naturelle, dont s’étonnait le plus candidement du monde l’excellent Prosper, qui, au contraire du chenapan, s’il était un impeccable humaniste, se montrait couramment un zoologiste déplorable. Bobinet, certain jour, ne lui avait-il pas fait hommage d’une vaudoise en la lui présentant comme un saumulard, bien qu’entre les deux espèces il y ait à peu près les mêmes rapports qu’entre une pantoufle et un cornichon ? Prosper trouva que les saumulards du Guer avaient un déplorable goût de limon ; il ne lui vint pas à l’idée de soupçonner la bonne foi de Bobinet, et ce premier succès du coquin lui dut être un encouragement à