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qu’au moment précis où le portier Kermaho, pendu à la cloche, commençait à en tirer cet insupportable mi-mi-do, mi-mi-do, glas de nos jeux d’écoliers. Sans doute la crainte de quelque algarade, peut-être un vague remords et la hantise de ce dîner de Noël qui lui pesait sur la conscience, faute de l’avoir pu rendre aux Lefur, l’incitaient-ils à retarder ainsi son entrée. Le fait est — et de quel air penaud, troublé, mal à l’aise ! — qu’il prenait à peine le temps de saluer M. le Principal et de serrer les mains de ses collègues : ses béquilles retentissaient presque aussitôt sous les arceaux du cloître et il s’engouffrait dans sa classe où il retrouvait seulement sa pleine tranquillité d’esprit. Une tape sur le pupitre : tout le monde se levait.

Incipe, Bobinet. C’est à ton tour : la prière. Car, en ces temps reculés, il était de règle que l’oraison dominicale préludât à tous les exercices. Chacun la bredouillait à tour de rôle ; les autres répondaient amen. Et nous n’y mettions peut-être point toute l’onction qu’on y apportait dans l’établissement d’en face ; mais enfin nous ne songions point encore à nous sentir offensés dans notre dignité d’apprentis-citoyens par cet accroc anticipé au principe de la « neutralité scolaire ». Bobinet, comme les camarades, se conformait à l’usage et, quand venait son tour de réciter le Pater, n’introduisait aucune variante dans la récitation du texte évangélique, la plus belle, la plus auguste des prières, sinon que tantôt il attaquait les premières