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Au fond d’elle, la régente admirait une confiance si robuste et si bien défendue contre toutes les surprises, mais ne s’y laissait point gagner. Cependant, par prudence, elle réservait encore son jugement jusqu’à l’arrivée du quatrième messager qui ne pouvait tarder beaucoup. Des quatre muguets, Belz était le plus hardi et le plus expérimenté. Ses fines moustaches, cavalièrement troussées, son œil impérieux et qui savait pourtant s’attendrir, sa prestance, son phébus et cette réputation d’invincibilité qui le précédait partout en faisaient un séducteur fort au-dessus du commun : si Bombelles, Saint-Phar et Bruc n’avaient qu’ébréché la vertu de Madame de Kerjean, Belz était l’homme qui devait emporter la place du premier coup. Ce César de ruelles n’avait qu’à paraître pour vaincre et la régente attendait de lui la preuve décisive qui terrasserait le présomptueux René.

Son attente ne fut point trompée. Au bout d’une nouvelle semaine, il arriva au Louvre un quatrième messager, avec l’envoi du marquis de Belz. La régente était si impatiente d’en apprendre le contenu qu’elle déchira le sachet : une bague s’en échappa qui alla rouler aux pieds de René. Celui-ci la ramassa et pâlit.

— C’est l’alliance de Françoise, dit-il. Nos chiffres et nos noms sont gravés à l’intérieur de l’anneau.

— Vous ne doutez donc plus ? dit la régente, car, plutôt que de livrer son alliance, une honnête femme préférerait mourir…