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de la contenir. Telle quelle, l’aimable fille ne manquait pas de soupirants. Il s’en voyait chez elle de tout poil et de toute couleur, comme on dit, depuis ce freluquet de Petit-Fitel jusqu’au vieux beau Noël Danglade, toujours tiré à quatre épingles, ruiné d’ailleurs et que ses filles se tuaient à entretenir, sans parler du brasseur Pfister, de l’ancien procureur impérial Caouennec et de mon bon maître François Chauvin, ostréiculteur en chambre et inventeur d’un système perfectionné pour la fabrication du beurre de baleines.

Mais, de tous les adorateurs de Marie-Charlotte, le plus fidèle était assurément Prosper, encore qu’il n’en attendit rien. La blonde enfant, à ses déclarations, répondait depuis dix ans par le même sourire de béatitude, qui disjoignait pour quelques secondes les hémisphères conjugués de ses joues, et il en eût pu induire que les dites déclarations ne la laissaient point indifférente si, quand il voulait passer à l’application et serrer d’un peu près son corsage, les trente-six chandelles que lui faisait voir instantanément la paume de la gaillarde n’avaient constitué un luminaire à la clarté duquel il était impossible que Prosper s’abusât sur la définitive vanité de ses entreprises amoureuses. En suite de quoi, l’excellent humaniste qu’il demeurait au plus fort de ses tribulations se frottait le visage et appelait à son secours la sagesse antique :

Æquam mémento rebus in arduis

Marie-Charlotte n’entendait que les premières