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Madame Prosper poussa un soupir et déclara que son médecin, jusqu’à nouvel ordre, lui avait interdit l’usage du petun. Cela ne l’empêchait point, dans les premiers temps, quand une commère charitable, au sermon ou à la cohue, lui tendait sa « queue de rat », d’y aller des deux mains, comme on dit, et de se bourrer le nez avec une vraie frénésie. On trouva qu’elle manquait de discrétion et on rentra les tabatières dès qu’elle paraissait. Cependant, forte de l’expérience acquise, Hortense avait grand soin maintenant de dissimuler en lieu sur les provisions qu’elle rassemblait en vue du fameux dîner : car elle n’avait pas renoncé à l’espoir de traiter M. et Madame Lefur. Tous les autres ménages de professeurs s’étaient depuis longtemps mis en règle avec le principal, même M. Lozac’h, le professeur d’enseignement spécial, qui était garçon pourtant et habitait chez sa sœur, sage-femme à Buzulzo.

Grande mortification pour Madame Prosper ! Quand elle osait élever la voix devant son mari, elle lui citait ce Lozac’h dans le secret espoir de piquer son amour-propre.

— Un pied-plat, un lécheur de bottes ! ripostait dédaigneusement Prosper, un fourbe qui ne procède que par insinuations et flatteries, per sycophantiam atque per doctos dolos… Eh ! Eh ! doctos dolos… Voilà qui s’appliquerait encore mieux à sa sœur la sage-femme… Hortense, je dis que la servilité de cet homme fait la honte du corps universitaire.