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maintien supérieur de grande bourgeoise, glaçait la pauvre Hortense qui se sentait, sous ses yeux d’acier, redevenir l’humble meschine d’antan. Et là n’était point le plus fâcheux, car enfin, quoi qu’en pensât Uchénie, il est toujours facile de se taire ou d’ouvrir la bouche seulement pour répondre amen. Mais le caractère d’Hortense était tout l’opposé de celui de Prosper et, jusqu’au sein des plaisirs, elle ne pouvait se soustraire à l’appréhension du lendemain ; elle songeait que cette frairie noëlesque des Lefur n’était dans leur pensée qu’un prêté pour plusieurs rendus. Il n’y a point de petit profit et Madame la Principale était l’économie en personne. Son dîner annuel ne lui coûtait que la peine de le préparer ou quasi : ce qui n’en était pas prélevé sur l’ordinaire des pétras provenait — jusqu’à la dinde, — de générosités particulières ; il était rare qu’une fois le mois au moins quelque parent d’élève ne joignît pas aux provisions de l’enfant une moche de beurre, un poulet, une douzaine d’œufs à l’intention de Madame la Principale.

Heureuse Madame Lefur ! pensait Hortense, et que n’en était-il des femmes de professeurs comme des femmes de principaux ? Mais, quand une Madame Calvé ou une Madame Prosper « rendait sa politesse » à Madame Lefur, c’était bel et bien à deniers comptants, et le charcutier, le boucher, l’épicier entendaient qu’on les réglât séance tenante.

Hélas ! il y avait beau temps que ces fournisseurs avaient cessé de faire crédit aux Prosper