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Et la simplicité de cet accueil nous ouvrait des jours inattendus sur les mœurs des cours et le langage des souverains. Aussi bien et d’avoir vécu dans la familiarité des grands de la terre n’avait pas enflé le cœur de Poupart. La modestie sied aux héros. Habillé invariablement d’un velours marron à grosses côtes, guêtre jusqu’aux cuisses et chaussé de brodequins de roulier, Poupart courait le lièvre avec ses bassets tout le temps qu’entre ses classes il ne humait pas le piot chez Jacquette, à l’enseigne du Soleil-Levant. Un héritage l’avait enrichi vers la fin de sa carrière et il aurait pu jeter le bât du professeur ; mais l’habitude était la plus forte et notre homme continuait à enseigner aux petits Lannionnais rosa, la rose, et ses prouesses alternées de nemrod et de garde-national.

Tout autre était le père Calvé, régent de sixième et de cinquième classiques. Celui-là n’avait rien de guerrier. On disait qu’il avait été séminariste et il se pouvait bien en somme, tant il était gauche et emprunté. Mais cette gaucherie pouvait aussi trouver son explication dans l’otite récalcitrante dont il était affligé. Comment, avec cette infirmité, lourd, velu, quinquagénaire, avait-il encore compliqué sa vie d’une épouse plus jeune que lui de vingt ans et qui était cette même Irma Cadras dont le nom prêtait à un si déplorable à peu près ? C’était le secret du bonhomme et de sa fringante moitié, laquelle, sans doute, en raison de son passé orageux, eût éprouvé quelque peine à trouver