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deux agents flegmatiques, ennemis-nés des bagarres et des horions, elle était tout de suite débordée, noyée, réduite à l’impuissance… L’avocat Rivoalan, par bonheur, touchait à sa péroraison. Elle fut sublime comme le reste et fit d’autant plus d’impression sur la foule que le gaillard avait réservé pour cette partie de son discours un effet absolument inattendu. Saisissant le balai d’égoutier que portait un de ses hommes, il le brandit devant Piphanic suffoqué, et l’on vit, qu’à sa hampe flottait un chiffon blanc odieusement maculé.

La foule, enthousiasmée, battait des mains, ricanait, huait Piphanic.

— Le voilà, votre drapeau blanc ! criait en même temps Rivoalan, qui, de sa main restée libre, avait happé Piphanic par le collet de son habit et l’entraînait vers la place du Miroir d’où l’on apercevait la tour de l’église paroissiale. Voilà le cas que nous faisons de ce drapeau des émigrés et des chouans ; il n’est bon qu’à balayer le ruisseau. Notre drapeau à nous, le drapeau de Danton, de Saint-Just et de Camille Desmoulins, c’est le drapeau qui flotte en plein ciel, là-haut ; c’est le drapeau du Dix-Août et de la Révolution… Saluez tous, citoyens !…

Une grande acclamation monta vers le sommet de la tour que désignait le geste emphatique de Rivoalan, et, quoiqu’il en eût, les regards de Piphanic se portèrent dans la même direction. Le bonhomme, qui n’avait point bronché jusqu’à ce