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Bobinet, qui depuis quelques minutes paraissait indifférent au frétillement des carrelets sous ses pieds, me dit de ce ton semi-impératif, semi-condescendant, dont il ne se départait point à mon endroit :

— Il faut que tu sois cet après-midi, au coup de deux heures sonnantes, devant la Folie-Piphanic. Il fait beau ; le bonhomme sera dans son jardin. Tâche d’amener avec toi Vernal, Soilet, Peusaint, Cornic, Phulup et quelques autres. Vous grimperez sur le mur, et vous vous mettrez comme d’habitude à crier : « Piphanic ! Piphanic ! Henri V est arrivé ! »

— Bon, dis-je, et après ?

— Après… Vous verrez bien…

C’est assez l’habitude des chefs, et l’on peut dire de tous les esprits vraiment supérieurs, de ne jamais se livrer tout entiers. Bobinet me l’eût appris, si je l’avais ignoré. Je me risquai seulement à lui demander s’il ne ferait pas partie de l’expédition.

— Non, me dit-il, c’est toi qui commanderas, cette fois… Moi, mon poste est ailleurs… Sois exact, par exemple… Arrive avec les amis plus tôt que plus tard… Mais ne grimpez sur le mur que quand vous aurez entendu la cloche du Baly sonner deux heures… C’est important… Et soignez les cris… Tous ensemble, comme ça, les mains en cornet : « Piphanic ! Piphanic !… »

— Compris, répliquai-je. À deux heures, devant la Folie-Piphanic…