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enfin, qui sait ? Quoi qu’il en soit, depuis sa convalescence et comme si elle avait été brusquement éclairée sur les véritables sentiments de la douairière de Sonil, Jennie refusait la compagnie de sa belle-mère et, qui pis est, ne mettait plus le pied à l’église, même le dimanche. Elle passait tout son temps dans la tour, accoudée à la fenêtre d’où, pour la dernière fois, elle s’était montrée à Xavier et l’avait vu s’éloigner sur la route. Un soir — la fenêtre est pourtant bien étroite, — trompée peut-être par l’obscurité, elle se pencha trop : on retrouva son corps dans la douve, au matin, parmi les nénuphars… »


IV


Malézieux s’arrêta un moment. Le drame qu’il évoquait nous devenait comme présent dans le décor où il s’était déroulé et dont pas une pierre, pas une herbe, semblait-il, n’avait bougé. La Théologale, la fenêtre à croisillons près du rempart, la douve aux eaux verdies étaient là et il n’y manquait que le corps de cette Ophélie bretonne, flottant parmi les nénuphars…

— Oui, dit Malézieux, en secouant la tête comme pour chasser des réflexions trop pessimistes, c’est affreux, cette mort de la pauvre Jennie, et, s’il est difficile de l’imputer directement à Madame de Sonil…

— Bien difficile, en effet, interrompis-je. Dans