Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 3, 1910.djvu/291

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de tendresse, si remplies de bonheur, que son égoïsme d’amoureux supporta sans trop de peine l’éloignement d’une mère qui avait pourtant été jusque-là l’objet de sa fervente vénération. De plus en plus épris de sa femme, il ne pouvait se résoudre à la sacrifier aux préjugés maternels et, s’il remettait les pieds à la Théologale, comme on appelait, du nom même de sa dépendance, la demeure patrimoniale des Sonil, il entendait n’y pas rentrer seul, mais Jennie à son bras.


III


« C’est à ce moment, continua Malézieux, qu’un télégramme ministériel ordonna l’envoi en Extrême-Orient du Descartes, à l’état-major duquel appartenait M. de Sonil.

« Dans la surprise que lui causa cette nouvelle, qu’il eût accueillie jadis avec des transports de joie, Xavier demeura tout étourdi. Il lui eût été aisé bien certainement de permuter avec quelque camarade, jaloux des lauriers que lui-même dédaignait, et peut-être s’y fût-il décidé, en dépit du tort que lui eût causé cette décision, s’il n’avait réfléchi que, quoi qu’il fît pour retarder le sacrifice, il viendrait toujours un moment où il lui faudrait partir en escadre et quitter Jennie. D’autre part à qui confier celle-ci pendant son absence ? Elle n’avait plus de famille et, à l’idée de la laisser