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Malheureusement, il se mit à la choyer et à la gâter plus qu’il n’est raisonnable. Il ne lui refusait rien. Elle était toujours habillée comme une enfant de noble et il n’y avait que sa coiffe et son châle qui fussent conformes à son rang. Je l’ai connue toute petite, cette Marie-Reine ; tu ne peux t’imaginer comme elle était jolie déjà et quelle séduction émanait d’elle. On se retournait jusque dans l’église pour la regarder. On se retourna bien davantage quand le bouton passa fleur. Non, mon fils, je crois qu’une femme n’a jamais été parfaite de corps autant que cette Marie-Reine, entre sa seizième et sa vingt et unième année ! Et ce n’est pas seulement qu’elle fût souple et bien prise et qu’elle eût des mains et des pieds qu’auraient pu lui jalouser les duchesses, mais elle avait vraiment l’air d’être d’une autre espèce que nous. Rappelle-toi l’expression angélique de sa figure, ce teint de lait, ces jolis cheveux dorés, presque aussi fins que des fils de la Vierge, surtout ses yeux dont la langueur était délicieuse. Elle était trop belle. Il n’est pas bon qu’une créature humaine soit si belle. Je ne sais pas combien de partis elle refusa les uns après les autres, et les plus conséquents du pays. Quand venait la fête de Perros, au bal des régates, on ne faisait attention qu’à Marie-Reine. On m’a cité des messieurs qui, faute de pouvoir danser avec elle, préféraient manquer la gavotte…

« Tu vas me dire qu’elle était un peu fière ; oui, sans doute, mais que veux-tu ? La malheureuse