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estimées à trente et quelques mille livres de revenus, qui en vaudraient le triple ou le quadruple aujourd’hui, la famille Barbier n’était point sortie encore de page et ses chefs ne portaient que le titre modeste d’écuyers. Tout changea, grâce à René et à sa femme. Je ne garantis point l’authenticité de la jolie anecdote qu’on place à l’origine de leur élévation et dont on a vu que certains auteurs faisaient honneur à une autre Françoise et à un autre seigneur de Kerjean. Mais est-il vraisemblable que les Olivier en aient été les héros ? Ces petits gentilshommes ruraux, anoblis de fraîche date, se confinaient d’ordinaire dans leurs manoirs et y menaient l’existence des paysans. Il est plus raisonnable d’attribuer l’aventure à René Barbier et à Françoise de Quélen et de la situer aux environs de 1610. Musset, qui en avait lu peut-être le récit abrégé dans Kerdanet, y a brodé les délicieuses arabesques de sa fantaisie. La légende bretonne est plus simple, mais elle a encore quelque grâce et une fleur de naïveté que nous avons tâché de lui conserver[1] :

LES BALINIERS DE KERJEAN
I

René Barbier, sieur de Kerjean, n’avait jamais été à la Cour, bien qu’il fût, au dire de chacun,

  1. Voir, dans le Foyer breton de Souvestre, une variante de cette légende.