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la Rance, etc. On ne consulta même pas, sauf après coup et sur des points de détail, les représentants bretons ; on traita la volonté populaire en quantité négligeable ; on ne divisa pas la Bretagne : on l’écartela.

Nous souffrons après cent ans passés de l’erreur constituante. Et peut-être n’est-ce pas assez dire : nous en mourons. L’accord est fait sur ce point entre tous les esprits sans préjugé. Je citais plus haut quelques noms de décentralisateurs républicains. J’aurais pu leur ajouter Louis Blanc qui écrivait dès 1850 : « Qu’est ce que Paris ? Qu’est-ce que la France ? Imaginez un champ : au lieu de l’ensemencer dans toute son étendue, on s’est avisé d’entasser la semence en un point où elle risque de ne germer pas, précisément parce qu’elle y est entassée. Ce champ, c’est la France ; ce point, c’est Paris ». Sous une forme plus concise notre grand compatriote Lamennais avait dit : « La centralisation, c’est l’apoplexie au centre, la paralysie aux extrémités ».

Et, puisque Lamennais nous a ramenés en Bretagne, restons-y. Nous y pourrons admirer un spectacle rare, celui de royalistes déterminés, féaux du trône et de l’autel, comme MM. de Lorgeril, de la Morvonnais, de Chateaubriand, de la Villarmois, du Haut-Jussé, etc., marchant la main dans la main, sur ce même terrain de la décentralisation, avec une républicaine et une matérialiste notoire, la propre traductrice de Darwin, Clémence Royer.