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Devant qu’il ne se découvrît poète, M. Le Mouël avait été dessinateur. Il se plaisait à fixer d’un trait preste et sûr, encore que légèrement caricatural, les « bonnes gens » en chapeau tromblon et les logis moyenâgeux de sa ville natale. Il a gardé dans ses vers le tour de main de l’artiste. Il écrit comme il dessinait. La Bretagne, qui est en réalité le pays le plus fermé, le moins accessible à l’observateur du dehors, est aussi le pays qu’on a le plus vite fait de s’assimiler superficiellement : ses costumes, ses mœurs, ses légendes tranchent sur la platitude ambiante et lui composent une physionomie pleine d’imprévu et si facile à dégager, — en outre ! Né en Normandie, à Villedieu-les-Poëles, mais de souche bretonne, c’est évidemment ce pittoresque de la Bretagne qui a tenté M. Le Mouël et l’a refait Breton. Une éducation toute parnassienne, la fréquentation assidue, dans les galeries du passage Choiseul, d’un Hérédia, d’un Coppée, tempéraments de descriptifs, plus sensibles au décor de la vie qu’à la vie elle-même, achevèrent de le confirmer dans son interprétation un peu extérieure et conventionnelle de notre pays. Telle quelle, s’il est licite aux géographes comme M. Vallaux de ne voir là qu’une Bretagne de clinquant, cette Bretagne de M. Le Mouël n’en reste pas moins pour le commun des mortels très séduisante, très « poétique », sinon très authentique, et la plus propre du monde à conquérir le public. C’est, si je puis dire, une Bretagne de « tableau de genre », vue et traitée par