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pèlerinage sentimental correspondent les quatre exaltations poétiques que M. Beaufils a réunies sous le titre de Paysages d’Italie. C’est bien ici que le mot d’Amiel est vrai : « Un paysage est un état d’âme ». Les paysages chantés par M. Beaufils sont ses états d’âme successifs au cours de sa trop rapide excursion dans l’Italie du Nord :

Milan, porte qui s’ouvre enfin sur l’Italie !
J’y suis entré joyeux à la fois et tremblant
Par une fin de jour d’automne, où le ciel blanc
Était pareil aux ciels de l’école lombarde,
Si doux, si fins et si pieux qu’on les regarde,
Ému par leur élyséenne gravité,
Comme on contemplerait dans un songe exalté
L’atmosphère où fleurit le paradis lui-même.

Que cette joie et ce tremblement ont ici leur pleine valeur d’expression ! Le lyrisme, un lyrisme naturel, spontané, sans effort, — très artiste cependant — déborde toutes les pages du livre. On dirait un amant qui vient de posséder pour la première fois une maîtresse adorée et qui égrène une litanie d’actions de grâces.

Florence ! Symphonie en argent pâle et fin,
Ton nom seul est comme un paysage divin,
Et comme un cristal grave il chante et se prolonge,
Avec une langueur nostalgique de songe.
Nom qui fond et qui flue en étrange douceur,
Florence ! Et chaque lettre en est comme une fleur.
Ces roses et ces lis lointains de la légende
Dont le front de tes soirs encore s’enguirlande.
Ville ou jardin, palais, place, église ou tombeau,
Tout garde la jeunesse immortelle du beau.