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Les laques, l’argent fin, la soie et les essences,
L’autruche à Djibouti, la perle à Singapoor,
Et ces hamacs brodés de plumes d’oiseaux, pour
Les soirs de l’Equateur, verts de phosphorescences ;
Fourrure au Groënland, cigarette à Cuba,
Ceux que porte vers nous la houle du tropique
Ont entassé, jaloux, la cargaison féerique ;
Et demain, accourant avec le cœur qui bat,
Ils nous la jetteront, tout joyeux dans leurs âmes
D’avoir fait refleurir sur des lèvres de femmes
Le sourire oublié des reines de Saba !

Beaux vers, capiteux et prenants ! Je ne sais pas si l’on a suffisamment rendu justice à leur auteur ; je ne vois point que l’assentiment public lui ait donné place dans le chœur sacré où il introduisit successivement Mmes Alphonse Daudet, de Noailles, de Régnier, Daniel Lesueur, Delarue-Mardrus, Renée Vivien, Hélène Picard, André Corthis… Mme Perdriel-Vaissière me semble réunir cependant toutes les qualités requises pour être notre neuvième Muse. Elle présiderait aux brises et aux eaux marines ; elle aurait dans son département

Les tours, les rampes crénelées
D’où surgit l’escalier du port,

Le fourmillement des mâtures,
Les flancs lourds des bateaux en fer,
La côte aux rousses découpures,
Les feux au lointain de la mer…

Et cette musa navalis nous changerait de tant de muses pédestres.