Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 3, 1910.djvu/188

Cette page a été validée par deux contributeurs.

de sa vie, de ses travaux, de sa foi scientifique, non point conquise de haute lutte, mais lentement, péniblement acquise, vraiment nous nous sentîmes attendris.

C’est qu’il n’y a pas de drame qui égale en intensité celui d’une intelligence aux prises avec l’énigme de l’univers. Beaucoup des convives n’avaient qu’une sympathie médiocre pour les théories de Mme Royer. Ils étaient Bretons en majorité et, pour les sentimentaux que sont les Bretons, le matérialisme intransigeant à la Buchner et à la Clémence Royer aura toujours contre lui d’être trop simpliste. Le cœur ni l’âme ne trouvent leur compte à ses solutions. Nous sommes une race de nuances. Les femmes seules, chez nous, feraient exception à la règle. Elles sont beaucoup plus hardies et plus absolues que les hommes, et Clémence, dont Renan, avec une pointe de malice, disait qu’elle était « presque un homme de génie », fut bien femme sur ce point. Le désaccord était donc assez vif entre l’orateur et une bonne partie de son auditoire. N’empêche que, même pour ceux qui ne partageaient point ses idées, c’était un spectacle émouvant et beau que celui de cette humble petite vieille, s’assurant dans la bonté de sa foi scientifique et, pauvre, méconnue, écartée des honneurs officiels, estimant qu’elle avait le vrai bien, puisqu’elle possédait la certitude.