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Bref, « l’état d’âme » de Leconte de Lisle en 1840 reproduisait fidèlement celui des romantiques de l’époque, nourris de Saint-Simon, de Fourrier, de Lamennais et du Père Enfantin : c’était une aspiration vague vers un idéal de fraternité sociale, de christianisme démocratique, de fusion universelle des esprits rapprochés et réconciliés en Jésus. Ces chimères faisaient la substance même des articles et des vers que le futur auteur de Qaïn donnait à la Variété. Le journal dura douze numéros. On sait le reste et comment, le 11 mars 1841, qui fut le mois où la Variété passa de vie à trépas, Leconte de Lisle fut de nouveau cité devant la Faculté de droit pour y recevoir un blâme. Autre blâme le 23 juillet, suivi de la perte de son inscription. Les parents du jeune homme finirent par se fâcher. On menaça de lui couper les vivres. Tout à ses velléités littéraires, le jeune homme répondit en s’associant à un certain Paul Duclos, pour fonder le Scorpion, gazette dont le titre promettait. Le premier numéro était prêt quand l’imprimeur, effrayé de l’audace des articles, se déroba. Leconte de Lisle et Paul Duclos l’assignèrent le 28 décembre 1842 devant le Tribunal civil de Rennes, qui les débouta de leurs prétentions et donna gain de cause à l’imprimeur. Ce fut le coup de grâce : Leconte de Lisle, ses dernières ressources épuisées, ne résista plus aux