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et à la mesure ; peu satisfait d’avoir réhabilité Perrinaïc, Quellien voulut bientôt qu’on lui élevât un monument expiatoire, et quel monument ! Il rêvait pour la statue de son héroïne un piédestal grandiose, un massif « colossal » dans le genre de celui d’Alise-Sainte-Reine qui porte la statue de Vercingétorix. Le Méné-Bré faisait, dans sa pensée, un pendant tout trouvé au mont Auxois. Ce n’est pas le plus haut sommet des Arrhées de Cornouaille, mais c’en est le plus central, et la Nature, qui prévoyait Quellien, lui a donné la forme vague d’un socle. Sur ce socle, jusque-là, ne s’élevait qu’une petite chapelle, dédiée au bon saint Hervé, patron des bardes de Bretagne. Quellien, qui était barde lui-même, n’avait aucune malice contre saint Hervé ; mais il lui préférait Perrinaïc, qui était un peu la fille de son cerveau et dans laquelle il avait mis toutes ses complaisances. C’est pourquoi, par ses soins, un comité fut formé, des appels lancés, la presse mobilisée, un sculpteur et un architecte désignés et, pour réunir les fonds nécessaires à l’entreprise, Quellien lui-même partit en province dans une tournée de conférences.

Là fut l’erreur. Sur le boulevard, l’auteur de Perrinaïc était en terrain sûr, et les Parisiens, auxquels il présentait son héroïne, avaient trop de galanterie pour demander à vérifier son état civil : Quellien n’assurait-il pas qu’elle était « jeune », jolie et qu’« en elle s’épanouissait toute la vertu bretonne, alliance de grâce et de force » ? Il suffi-