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jobard, acceptait de construire à ses frais la fameuse digue insubmersible qui devait s’arrêter primitivement à deux cents mètres de la Porte de l’Avancée et qui, continuée jusqu’aux remparts, allait consommer la ruine du Mont.

Présentée par les ingénieurs comme un simple chemin d’accès en prolongement de la route de Pontorson, cette digue constituait en effet beaucoup moins un chemin qu’un barrage, un énorme remblai de protection contre la mer qui, ne pouvant plus circuler autour du Mont, est rabattue vers les remparts dont elle sape les assises. Et tel est bien le rôle que la Compagnie entendait lui faire jouer. Sa manœuvre sournoise avait parfaitement réussi. À l’abri de la digue, le colmatage de la partie occidentale de la baie s’est effectué avec une rapidité extraordinaire ; l’herbu ou pré-salé, que ne dérangeaient plus les divagations du Couesnon, a gagné chaque jour du terrain ; il n’est plus séparé du Mont que par le chenal de la rivière et deux cents mètres de grève. Au pied même de la digue, sur la partie orientale de la baie, les dépôts de tangue s’accumulent, de grands bancs verdâtres, qui, s’élargissant, auront bientôt rejoint les herbus en formation derrière la digue submersible de la Roche-Torin. Cette jonction une fois faite, le Mont, à l’est et à l’ouest, sera définitivement bloqué. On calcule effectivement que, depuis la création de la digue et la canalisation du Couesnon, les apports de la mer se chiffrent annuellement, dans la baie du