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presque aussitôt avec une patène de vermeil où Jésus avait trempé le bout des doigts. Il leva l’index sur Marc-Pierre, et celui-ci crut sentir une petite pluie fine tomber sur sa tête…

La pluie, en tout cas, n’était pas une imagination. Cependant, comme la tempête ouvrait brèches sur brèches dans la toiture, les gouttes avaient bien pu tomber directement du ciel sur Marc-Pierre. Et cette douche glacée le réveilla. Il se frotta les yeux et regarda autour de lui : l’abside était vide. Plus de Sœurs blanches ! Plus de Jean Bré ! Et Jésus sur sa litière, Marie et Joseph à ses côtés, Gabriel au seuil de la crèche, les Rois devant, l’âne et le bœuf derrière, avaient repris en même temps leur immobilité.

Il devait être très tard et, songeant à l’inquiétude des siens, Marc-Pierre se leva vivement de la chaise où il s’était endormi. Pourvu que les portes de l’église ne fussent pas fermées ! C’était sa seule crainte, car, chose étrange, il n’avait plus peur de confesser sa faute à ses parents et de leur dire où il avait passé la veillée. En vérité Marc-Pierre n’était plus Marc-Pierre. Il prit congé de Jésus, des Saints et des Rois par un gentil salut circulaire et s’élança vers la porte principale ; mais il eut beau la secouer : si grosse, si lourde, bardée de fer, la mâtine résista, et la petite porte, quoique moins épaisse, ne se montra pas plus complaisante. Jean Bré, sa ronde faite, leur avait soigneusement donné un double tour de clef à toutes deux.