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maison duquel on s’était arrêté, un dialogue rimé s’engageait, qui se terminait toujours par une large distribution d’aumônes. La Villemarqué place son gracieux débat poétique à Spézet, dans les montagnes d’Arrhée. Mais à Morlaix, à Landerneau, à Lesneven, une procession du même genre, accompagnée peut-être du même débat, se déroulait par les rues[1]. D’assez bonne heure, du reste, l’usage s’en perdit. Au contraire, à Saint-Pol-de-Léon, où une étiquette spéciale réglait la cérémonie, il se continua jusqu’à nos jours, puisqu’en 1903 encore, dans un article du Petit Français, M. A. Vibert disait qu’il lui avait « été donné » d’assister au défilé du cortège et racontait ainsi la scène :

« Un pauvre du pays et deux notables propriétaires de la ville promènent par les rues un cheval dont la tête est ornée de gui et de lauriers et portant en selle deux mannequins recouverts de draps blancs ; des enfants et des oisifs suivent le cortège en poussant de grands cris. À chaque seuil, on s’arrête pour recevoir les dons en argent ou en nature, afin que le lendemain les pauvres puissent célébrer gaiement la fête et, à chaque munificence, la foule répète la clameur traditionnelle : Inkinnanné ! »

M. Vibert ajoutait que « personne du pays » n’avait pu le « renseigner sur ce mot, dont le sens est absolument perdu et qui ne subsiste que

  1. Voir, pour ces villes, l’Âme bretonne, 1re série, p. 263-264.