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n’a plus de raison pour « barioler » ces défuntes ni leur faire toilette avec des manchons et des collerettes en papier de couleur. Cela était bon en 1817, au temps de M. de Jouy. Mais quelle idée d’avoir remplacé la fève par une poupée de porcelaine ! C’est, dit-on, qu’il est d’usage, surtout dans le peuple, que le roi de la fève « régale » au dessert la compagnie et que des convives peu délicats préféraient avaler sans rien dire ce gros légume indigeste et se dérober aux charges d’une royauté dispendieuse. Je constate aussi que l’élection du roi, qui se faisait jadis sitôt « la soupière enlevée », ne se fait plus guère qu’au fromage. Et bénit-on même la galette ? Y trace-t-on, avant de la découper, un signe de croix ? C’est quand tous ces préliminaires étaient réglés qu’au surgat junior ! de M. le recteur ou de M. le vicaire, le plus jeune des convives se levait et s’approchait de la maîtresse de maison : on couvrait le gâteau d’une serviette ; on faisait faire au plat deux ou trois tours « pour ôter toute idée de dol ou de faveur » et notre Eliacin désignait « les portions. » Bien entendu, la première portion, toujours la plus grosse, était pour les pauvres. La fève tirée, le roi choisissait sa reine, qui venait s’asseoir à ses côtés ; les cris de « la Reine boit ! le Roi boit ! » retentissaient pendant toute la durée du repas ; au dessert enfin on procédait « aux élections des grandes charges de la couronne » : M. le recteur était promu grand-aumônier ; l’oncle à héritage ministre des finances et l’amphytrion maître de l’hôtel royal. Innocente