s’éleva du jubé. C’étaient des villageois et des villageoises en costume national qui s’étaient glissés silencieusement dans la galerie et qui venaient d’entonner une de ces mélodies galloises d’un accent si mélancolique et si pur tout ensemble. Quand les chœurs eurent cessé, lady Llanover fit descendre les exécutants et nous les présenta : leur chef ou penkerdd était un simple artisan nommé Peder qui, pour la circonstance, avait revêtu l’habit à basques, la culotte gros bleu, les bas à carreaux et les souliers à boucles. Ce joli costume d’opéra comique lui seyait à merveille, mais il ne détonnait point ici et s’accordait parfaitement avec le milieu.
Peder fut prié de chanter quelques soli : Suzanna l’accompagnait sur la harpe, et nous fûmes pleinement ravis de sa voix souple et nuancée et plus encore du secret instinct musical qui dirigeait tous ses mouvements. Mais cette sûreté d’exécution ne lui était point particulière, et on la retrouvait chez les moindres choristes, chez des petites filles d’une dizaine d’années qui, dans le jour, paissaient leurs bestiaux autour de Llanover.
Comment ne pas s’en étonner ? On nous expliqua qu’en Galles, comme en Allemagne, tout le monde naît musicien ou le devient peu ou prou. L’enseignement de la musique fait partie du programme de l’école primaire et ne le cède en importance à aucun autre ordre d’enseignement. Chez ce peuple de paysans et de mineurs, une voix juste et bien timbrée ne paraît pas moins nécessaire au bonheur individuel que la possession des quatre règles et la connaissance de l’orthographe.