Page:Le Goffic - L'Âme bretonne série 2, 1908.djvu/319

Cette page a été validée par deux contributeurs.

ruines. Le sentiment est louable, mais l’histoire et la poésie y perdront.

En pente douce, le parc menait vers le Skyrridd-Fawr, but et terme de notre excursion. Il cessait à mi-côte, et des fougeraies roussies, des mousses et des lichens roulaient jusqu’au sommet de la montagne leurs vagues courtes et frisées. Une brise aigre les rasait par moments et en tirait des sons métalliques d’une tristesse infinie.

Nous atteignîmes enfin la crête du Skyrridd et nous embrassâmes de là toute la vallée de l’Usk, ses grasses prairies verdoyantes, ses bouquets d’arbres, son lacis de routes et de ponts et les vingt petits villages éparpillés dans la plaine. Vers l’ouest, un rectangle de pierre plus massif, chevauchant l’Usk, signalait Abergavenny. Mais, de ce côté, l’horizon ne se dégageait point ; les détails apparaissaient mal, et, quoique notre guide nous désignât successivement les points intéressants de la ville, ici les vestiges du prieuré de Bénédictins fondé sous Henri Ier, là l’antique abbaye de Sainte-Mary’s Church, plus loin les tours démantelées du château municipal, — un des plus anciens de l’Angleterre, bâti tôt après la conquête — il nous fallut suppléer par l’imagination à l’insuffisance de nos yeux.

Des nuages rampaient au flanc du Bloreng et du Sugarloaf, se déchiraient et se reformaient en bancs pressés qui noyaient les sommets. Nous en sentions de pareils qui pesaient sur nous, et leur ouate humide nous glaçait.

Entre temps notre guide nous expliquait que,