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déposait pour lui, sur la pierre du foyer, une cruche de lait doux. Une servante fallacieuse s’avisa de remplacer le lait par de l’eau salée. Mal lui en prit : la nuit suivante, des griffes invisibles l’arrachèrent de son lit et la traînèrent par les escaliers. On la releva au matin toute meurtrie.

— Et qu’est devenu le pwcka de Minydd-y-Twyn ? demandai-je à lady Herbert.

— Voilà des années qu’il ne nous a donné de ses nouvelles. On dit qu’il est parti, mais qu’il reviendra quelque jour. Ce qu’il y a de sûr, c’est qu’il hantait encore la montagne quand j’étais enfant. Les domestiques de ma mère m’en menaçaient : « Il viendra vous prendre, si vous n’êtes pas sage », me disaient-ils. Cela me causait une frayeur mortelle. J’avais bien tort, car le pwcka de Minydd-y-Tvyn n’était point méchant, je le répète, malgré ses pieds de bouc et son bec d’espadon. La preuve en est que sur la montagne, quand les mules s’arrêtaient brusquement et se mettaient à flageoler sur leurs jambes, les muletiers n’avaient qu’à dire à voix haute : « Pour l’amour de Dieu, pwcka, laissez-les passer ! » Tout de suite il suspendait son sortilège…