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— Rangez-vous ! crie l’un de nos guides.

Nous nous collons contre les murs et, dans un tonnerre de ferraille, trépidant, vertigineux, sinistre, un train passe, un long serpent de wagons bas à traction électrique et dont le conducteur est benoîtement assis, les pieds ballants, sur les blocs de houille de la berline d’arrière.

Le premier émoi surmonté, nous reprenons notre marche à la queu leu leu. On nous fait visiter successivement les chambres d’accrochage, les postes de secours, les remises et les écuries, avec leurs cent trente chevaux aveugles qui ne remonteront d’ici que blessés ou morts. Peu à peu, cependant, notre respiration s’égalise : les puissantes machines de la chambre de ventilation nous envoient un air frais qui, je ne sais comment, ne se confond pas avec l’air chaud de l’intérieur, mais semble plutôt se superposer à lui. Les deux ingénieurs qui nous servent de guides et que rien ne distinguerait a priori des ouvriers qui nous croisent en chemin, vêtus qu’ils sont des mêmes habits de toile brune, coiffés de la même casquette, les yeux agrandis et luisants dans leur halo de charbon, nous donnent au fur et à mesure les explications nécessaires[1].

  1. Est-ce volontairement ? Est-ce simple hasard ? On ne nous montra cependant de la mine que le décor intérieur, si je puis dire. Beaucoup d’entre nous eussent aimé pousser jusqu’aux galeries d’abattage, voir jouer les baveuses à air comprimé ou telle de ces batteries de perforateurs électriques qui frappent jusqu’à cinq cents coups par minute et peuvent creuser en quelques heures un tunnel de dix à quinze mètres dans les roches les plus dures. Nos hôtes s’excusèrent sur le manque de temps.