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de nos voisins : eux aussi ont leurs syndicats ouvriers, leurs agitateurs et leurs grèves. Et ces grèves n’ont pas toujours le caractère pacifique que nous leur supposons à distance : « Jacob » et « Sarah » interviennent dans la discussion autrement qu’à titre de conciliateurs, et plus d’un patron éprouva qu’il ne fait point bon lier connaissance de trop près avec ces graves personnages bibliques[1]. Les prétentions des syndicats augmentent d’année en année. L’an passé (1898), la grève générale des mineurs, qui réclamaient les fameux trois huit du programme international, ne fut pas sans causer quelque perturbation dans la marche des affaires. La grève échoua sans doute et les ouvriers mirent les pouces. Mais elle peut reprendre et le dernier mot n’est pas dit. Actuel-

  1. Voir, par exemple, ce qui se passa en 1873, lors de la formidable grève qui mit brusquement sur pied tous les ouvriers mineurs de la Galles du Sud au nombre de plus de soixante-dix mille. Les patrons avaient réduit les salaires de dix pour cent. L’un d’eux, M. Philipps, ayant parlé de faire venir des Chinois de Californie pour remplacer les grévistes « Jacob », par lettre comminatoire, le menaça immédiatement « de la mort et de la damnation ». M. Philipps se le tint pour dit et ne fit pas venir de Chinois. On peut saisir là cependant le curieux mélange que font dans ces cerveaux de Celtes l’éducation confessionnelle et la passion naturelle du mystère. « Comme Rébecca, l’énigmatique correspondant ou dante qui, lors de la coalition contre le péage des barrières, adressait des menaces de mort aux pasteurs anglicans et dont un ne parvint pas à percer l’incognito, Jacob, dit M. Amédée Pichot, était la personnification de la grève et avait pour acolyte Sarah. »