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ne se fait point voir facilement en public ni même dans le privé, par suite de l’extraordinaire timidité dont il est affligé. Cette timidité va jusqu’à la phobie. Le marquis n’est vraiment à l’aise qu’au milieu de ses in-folio. Il s’est pris de passion pour l’Ancien Testament, et il a fait partager son goût à la marquise qui, pour lui plaire, s’est mise à l’étude du grec et de l’hébreu. Un fellow d’Oxford est attaché à sa personne, et il travaille avec lui sept et huit heures par jour. Même en voyage, aux eaux, à Carlsbad, le marquis n’entend point se reposer ; il lui faut son fellow et ses in-folio. Quant à l’histoire de ses enfants, il est bien exact qu’il a une fille boiteuse et qu’un de ses fils a hérité de la timidité paternelle, mais il n’est point sourd-muet. Loin qu’il songe à quitter le catholicisme, le marquis trouve de nouvelles raisons pour s’y ancrer, et il a fait récemment encore un grand pèlerinage à Lourdes. Bien entendu, le serment prêté au lit de mort de son père est purement apocryphe ; un tel manquement ne saurait s’accorder avec la vénération profonde, l’espèce de culte qu’il a voué au défunt marquis ; un jour qu’il faisait visiter ses appartements à lady Herbert, il la mena devant le buste de son père, le lui montra, les larmes aux yeux, puis le baisa dévotement. Et il y a une bonne raison aussi pour que lord Bute ne se soit point fait catholique par intérêt et afin d’épouser sa femme : c’est qu’il était catholique plusieurs années avant son mariage[1].

  1. Lord Bute est mort dans la religion qu’il avait embrassée volontairement (octobre 1900). Une des clauses