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GOÉLETTES D’ISLANDE




À Hené-Marc Ferry.


C’est demain qu’elles appareillent de Paimpol. Elles sont une cinquantaine qui se serraient les unes contre les autres dans les bassins et qui palpitaient d’un obscur frémissement aux approches de leur migration. Et si jolies toutes, radoubées, astiquées, peintes de couleurs tendres, fleuries comme pour une noce ! On leur avait fait toilette avant le départ. Et il fallait de bons yeux, certes, pour reconnaître en ces pimpantes voyageuses les livides « rescapées » du pôle qui s’abattaient sur nos rades, l’automne dernier, membrures craquantes, vergues en pantenne, dans un relent de saumure, de charnier et d’huile rance.

Elles s’appelaient, elles s’appellent encore l’Anémone, l’Alcyon, la Mouette, le Cyclamen, l’Étoile d’Arvor, la Pâquerette, le Gardénia, la Perce-Neige, la Marjolaine… Noms idylliques ! Là-bas, où vont les goélettes, il y a aussi des fleurs, des oiseaux, même, jusqu’au 30 avril, des étoiles.

Ce ne sont plus les étoiles du ciel breton. Les oiseaux appartiennent à des espèces inconnues, eiders, pingouins, lagopèdes, cagnats mantelés, si peu farouches qu’on les prend à la main et que chaque bateau en rapporte un couple ou deux « pour les jardins de M. l’armateur ». Quant aux fleurs, aux « fleurs d’Is-