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biche que nous montions vaille que vaille. L’amiral Serre m’avait pris en amitié. La campagne terminée, il m’emmena rue Royale, au ministère de la Marine, où il me casa comme fourrier de service pour finir mon congé. C’était dans le temps que M. Ricquier venait d’ouvrir pour les adultes, au lycée Charlemagne, un cours public de lecture et de déclamation. Quelqu’un m’y conduisit. Je ne connaissais de nom à cette époque ni Victor Hugo, ni François Coppée, ni Jean Richepin. Quelle révélation ce me fut quand j’entendis leurs vers, surtout ceux où ils font parler des marins ! Je les appris par cœur, je me les récitai à moi-même en les transposant, en leur donnant ce tour particulier, ce cachet de réalisme que la déclamation ordinaire ne pouvait leur prêter. La première fois que je me hasardai à les dire ainsi en public, j’eus bien un peu peur : c’était si neuf, si osé, ce que je tentais là ! On me sifflerait peut-être… On m’acclama. Les étudiants, mes auditeurs du Soleil d’or furent conquis d’emblée. J’avais le vent en poupe et il n’y avait plus qu’à « laisser arriver ».

Et voici comme « ç’arriva ».

La pêche à Terre-Neuve on le sait, s’exerce à la fois sur des goélettes métropolitaines, armées et désarmées à Saint-Malo, Cancale, Granville, Fécamp, etc., et sur des goélettes coloniales, dont les équipages sont expédiés de France au printemps et rapatriés à l’automne [1]. Des steamers de fort tonnage transportent à

  1. Pour plus de détails sur cette pèche, voir mes livres :