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toire, l’atrophie séculaire dont souffraient nos vieilles provinces françaises…

Donnons-nous l’illusion ce soir, autour de cette table où s’épanouit la fleur de nos costumes nationaux, que cette atrophie est conjurée pour la Bretagne. Me voici moi-même, comme seront peut-être mes petits-fils en « julot » du Léon : costume sévère qui s’harmonise avec mon front dégarni et la gravité de mes passagères fonctions présidentielles… Mais vous, Mesdames, que vous avez eu raison d’incliner vos préférences vers la vive et pittoresque Cornouaille du sud ! C’est le pays de la couleur. Les femmes y sont grandes et brunes et, dans leur fraise à godron et leur jupe évasée, semblent descendues tout exprès, pour confondre la chronologie et l’histoire, d’une toile du Pacheco ou de Velasquez. Il faut les voir au « pardon », le cierge en main, raides comme des nonnes, et il faut les voir à la danse, celles du moins qui, bravant les foudres de « M. le Recteur »,

D’une hanche agaçante ont appris le secret
Et font, d’un tour de tête aussi vif qu’un coup d’aile,
Sur leur col gracieux voltiger la dentelle…

Ainsi fredonne Jos Parker, le « chantre de Fouesnant ». Et il faudrait écouter encore, sur les filles de Paimpol et de Tréguier, le magicien du verbe Anatole Le Braz, les alertes « monférines » qu’en l’honneur des Bigoudens et des Châtellinoises sonna Frédéric Le Guyader, les élégies alréennes de Pierre Laurent et les confidences qu’aux lèvres d’Auguste Dupouy, sur les quais d’un port breton baigné de lune, chucho-