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chands d’orviétan et les amateurs de billets circulaires ont appris en ces dernières années le chemin de Tréguier et de Rumengol, si la confrérie des bardes a quelque peu perdu de son autorité et de sa cohésion et qu’on puisse craindre en certains endroits que des dévotions nouvelles se substituent aux anciens cultes, ce ne sont là que des accidents passagers ou personnels à certaines localités ; les grandes panégyries y laisseront peut-être des lambeaux de leur longue splendeur populaire, mais les fêtes votives des petits saints de la légende bretonne seront protégées par leur obscurité même.

Ces pardons-là ne changeront point. Nous les retrouverons, telles qu’à présent, au creux des vallées solitaires, sur l’échine rugueuse des Ménez, dans les blés où elles sont venues s’échouer parfois, les chapelles minuscules aux nefs renflées comme des carènes, prenant le jour par des baies larges comme des hublots, et, sous leur toit sans voûte blasonné d’hermines d’or, abritant quelque vieux saint trapu dont le bâton épiscopal est plus proche d’un harpon que d’une crosse. Têtes de forbans et cœurs d’apôtres ! Ainsi nous apparurent, dans l’iconographie populaire, les Brandan, les Efflam, les Guirek, les Quémeau, les Samson, tous les « saints de la mer » débarqués d’Outre-Manche pour évangéliser la Bretagne. Ils ont leurs pardons comme les Renan et les Gwénolé. Les rites diffèrent quelquefois ; les us varient d’un diocèse à l’autre. Petits et grands, ces pardons de Bretagne ont pourtant certains traits communs qu’il est facile de dégager. Et d’abord ils sont nécessairement précédés