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vent redouter également tous les pays où elles se produisent. Il faut remarquer tout d’abord la forme atténuée et discrète du régionalisme breton. Les régionalistes de Bretagne ne demandent point pour eux un régime privilégié ; ils poursuivent, à un autre bout du territoire, la même fin que les régionalistes du Midi et de l’Est. Leurs revendications ont un caractère purement objectif : l’effort même qu’ils tentent pour la préservation de leur langue ne saurait être considéré comme une atteinte aux droits du français. Il y a unanimité sur ce point chez tous ceux qui ont étudié de près notre système d’enseignement. Je n’en citerai d’autre preuve que ce passage d’un discours prononcé l’an passé au Congrès de la Ligue de l’Enseignement primaire par un ancien ministre, député du Morbihan. « Les instituteurs, disait M. Guieysse, n’ont pas toujours su le parti qu’ils pouvaient tirer d’une langue adaptée à l’esprit de la population et dans laquelle les enfants avaient commencé à penser. Ils ont cherché à la proscrire ; mieux vaudrait l’enseigner rationnellement quand cela est possible[1]… Il y a toujours un avantage réel à posséder deux langues, et les Bretons perdraient beaucoup de leurs qualités natives, de leur originalité d’esprit, si leur langue natale venait à disparaître. » Cette déclaration est d’autant plus significative qu’elle

  1. Comme on l’a fait observer justement, M. Guieysse est ici plus régionaliste que les régionalistes eux-mêmes : ceux-ci se contenteraient que le français fût enseigné dans les écoles par l’intermédiaire du breton. C’était aussi l’avis de la Convention.