des filles publiques, astreints à la surveillance comme des repris de justice, ils ne peuvent dire la messe que dans leur église ni s’éloigner sans autorisation à plus de cinq milles. Pour les prêtres qui refusent le serment, outre la prison, la Chambre des communes réclame la flétrissure au fer rouge, en bonne place, sur la joue ; le Conseil privé propose la castration. Ce clergé catholique n’est pas rétribué ; il vit comme il peut. Le seul clergé reconnu, officiel, est le clergé anglican. La plupart de ses membres, surtout les hauts dignitaires, ne « résident » pas ; mais ils perçoivent la dîme, qui est écrasante pour le peuple et atteint souvent le tenancier dans son unique gagne-pain, par la saisie de sa vache ou de son pourceau[1].
Tout se tient dans ce système, formidable machine d’éviction et de mort, qui, de ses rouages fatigués, continue à broyer l’Irlande. Pour longtemps ? Ce n’est pas à croire, et les bourreaux se seront lassés plus vite que leur victime. Elle s’est rebellée plus d’une fois, cette victime ; la Shan van Vocht, la « pauvre vieille » de la chanson, sur son chevalet de torture, a plus d’une fois tenté de briser ses liens : ils se resserraient autour d’elle. S’ils se sont un peu relâchés en ce siècle, si la protestation du droit a fini par trouver une issue au dehors, l’Irlande catholique le doit moins à elle-même qu’à l’aide inespérée d’un anglican, d’un coreligionnaire de ses bourreaux, Parnell.
- ↑ Cf. Augustin Filon, le Parlement irlandais, article paru dans la Revue du 15 juillet 1886 et auquel nous avons emprunté une partie de ces détails.