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constations ce discord, nous voyons qu’il y entre à proportions variables toutes sortes de sentiments généreux, délicats et policés, que l’analyse aurait tôt fait de dégager chez un Gourlaouën, chez un Koun et chez un Henry. Ces sentiments ne sont pas d’égale valeur peut-être : aucun ne saurait être éliminé sans nuire au développement du patriotisme. Ce sont comme autant de sources auxquelles il s’alimente et qui se mêlent pour le former. Plus ces sources sont abondantes, plus l’amour du pays est puissant et, comme par des milliers de canaux, on le voit qui se répand dans tout l’organisme social.

Un Gourlaouën, un Koun, un Henry ne sont pas encore des exceptions chez nous ; mais j’entrevois un temps prochain où ils le deviendront, quand une à une, — sous prétexte de séculariser son cours, puis de l’accommoder aux exigences de la pensée libertaire, — nous aurons coupé le patriotisme de ses sources et, pour commencer, de la plus riche d’entre elles, du sentiment religieux. L’école aura son tour. Elle l’a déjà. Un vague humanitarisme s’essaie à teinter l’enseignement des maîtres ; les plus ardents réclament une refonte de la librairie classique, expurgée des textes où nous apprîmes qu’il est beau de mourir pour son pays. Et, après l’école, la famille, le stable et doux foyer de jadis, lézardé, vermoulu, battu en brèche par le divorce et le certificat de scolarité, s’écroulera sous la même poussée mystérieuse qui a ruiné chez nous tant d’institutions séculaires. Un sourd besoin de recomposition obsède les autres peuples. L’idée de race, si vivante chez les Germains,