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huit, sous-lieutenant à vingt, commandant la colonne d’assaut qui prend Constantine en 1837, laissé pour mort sous la voûte du Marché, grièvement blessé à la Mouzaïa, fait colonel sur le champ de bataille, et si bourré de plomb par tout le corps, cependant, qu’on lui entendra dire en riant qu’il avait « passé colonel au poids ». À son retour d’Algérie, en juin 1818, Cavaignac, qui se connaissait en bravoure, le nomma général. Ce fut un des premiers actes de sa présidence, et il n’en est guère qui l’honorent davantage. Ni lui ni Le Flô n’auraient soupçonné que c’était là un acte de pure forme et que la carrière militaire du nouveau brigadier était close avant que d’avoir commencé.

Il s’en ouvrit une autre, bien différente, où l’on pouvait croire que ne l’avaient point préparé suffisamment ses rudes chevauchées africaines, et qui fut, à deux reprises, le triomphe de sa vie de patriote et de citoyen. Ses deux ambassades en Russie, la dernière surtout, sont restées légendaires. M. Melchior de Vogüé, qui l’y a connu, en a fait une peinture pleine de mouvement et de chaleur.

« Avec des saillies déconcertantes, dit-il, et des façons de courir à l’assaut, avec beaucoup de finesse sous beaucoup de droiture, Le Flô s’était fait une diplomatie, à lui, qu’il prenait là où l’on ne prend guère la diplomatie, dans le cœur. »

Il conquit du coup celui d’Alexandre II. Grande amitié, rare, en l’espèce, d’un souverain à un homme qui s’est fait lui-même et, par surcroît, étranger ! Le mot d’amitié n’a rien d’excessif pourtant. C’est le seul qui convienne à ces relations affectueuses, vrai-