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Emon. Jusqu’à la nuit avancée, il tint la place indistinctement de tous les personnages devant une assistance ravie d’un tel événement. Les gendarmes de Lézardrieux durent mettre fin à ce spectacle en plein vent »[1].

Je ne sais trop ce qui amena la dislocation de la troupe lannionnaise. L’administration impériale, sollicitée peut-être par le clergé, la voyait d’assez mauvais œil. À partir de 1865, il n’y eut plus que de loin en loin, dans le diocèse de Tréguier, des représentations dramatiques. À Pluzunet pourtant s’était formée une nouvelle troupe d’acteurs, qui donna deux représentations d’un intérêt assez vif, l’une en 1867, à Saint-Brieuc, sous la direction de Luzel, l’autre en 1878, à Pluzunet même, le jour du grand pardon. Lanmeur eut aussi une compagnie d’acteurs qui se disloqua un peu plus tard et dont les « cahiers » furent achetés par la troupe de Ploujean ; il est question enfin, dans les Chansons et Danses de N. Quellien,

  1. Le Moullec et Kerambrun ne sont pas des exceptions. Sans étude, sans éducation, quelques-uns de ces acteurs populaires parviennent à s’incarner dans leurs personnages d’une façon vraiment merveilleuse. Tel, dans la troupe de Ploujean, le cultivateur Alain Guivarch qui jouait un héraut et dont la voix profonde, le geste ample, le masque orageux et tragique, furent une révélation pour tous les spectateurs. Tel encore, jadis, lors de la représentation du Mystère de sainte Tréphine, donnée devant les membres du Congrès celtique international réuni à Saint-Brieuc en 1867, ce charpentier de Belle-Isle-en-Terre nommé Goëlo qui, dans le personnage de l’évêque d’Aleth, faisait pleurer d’enthousiasme le grand historien Henri Martin.