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frappe même point ; il entre, marche droit au prince, qui tournait le dos à la porte, et, lui tapant sur l’épaule :

— Bonjour, mon fils ; comment vas-tu ?

Le prince se retourne, étonné ; mais devant le vieux prêtre qui le regarde en souriant, il se lève et salue avec respect.

— Bien, bien, mon fils, reprend l’abbé. Je savais déjà que tu es un bon enfant et je venais te charger d’une commission pour monsieur ton père. Nous avons été dans le malheur tous les deux ; lui aussi a mangé le pain de la douleur ; il n’a pas dû l’oublier. Cependant je lui ai écrit et il ne m’a pas répondu. Il n’a pas toujours été assis sur le trône (je dois dire que la tradition attribue au vieux prêtre une expression sensiblement plus énergique) ; qu’il se tienne sur ses gardes !…

Et, après une pause où il parut prendre une détermination qui lui coûtait, se dressant avec un geste brusque :

— Tiens, mon cher enfant, je ne veux pas en dire davantage ; il est ton père et je ne te ferai pas de peine. Mais tu lui diras que je suis accablé de fatigues de toutes sortes et que, s’il ne m’accorde pas le traitement d’un vicaire, c’est tant pis pour lui : je lui enverrai un bouquet…

L’abbé Le Roux n’est point une exception ; il court de ces vieux desservants bretons mille et une anecdotes qui les montrent, comme il fut, bonnes gens, simples gens, d’écorce un peu rude, mais de conviction ardente, cumulant volontiers, au plus grand bien