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elle était grâce accueillante et communicative. Un pli léger de la bouche, une courbe délicate du cou, un regard nuancé des sentiments les plus tendres, c’est assez pour lier les cœurs.

Son enfance fut celle des jeunes filles de la bourgeoisie trégorroise. Elle grandit dans la foi des vieux âges. Une atmosphère de piété, plus pénétrante et plus vive qu’en aucun lieu du monde, baigne cette trêve du pays breton qui, sous le nom de Minihy, comprenait autrefois, avec l’ancienne cité épiscopale de Tréguier, Plouguiel, Trédarzec, Kermaria et les chapelles votives des Cinq-Plaies et de Notre-Dame du Tromeur. Encore maintenant, dépossédé de la mitre et de la crosse que lui avait léguées son grand apôtre Tugdual, Tréguier est toujours la ville sainte de Bretagne. On y vient en pèlerinage des extrémités du Léon et de la Cornouaille. Dans ses rues silencieuses, où l’herbe pousse entre les fentes d’un pavé qui date de la duchesse Anne, l’ombre des hauts murs de ses communautés monastiques accompagne le voyageur pendant près de la moitié du chemin. La cathédrale, merveille de pur gothique, au cœur de la cité, semble absorber sa vie, la concentrer toute en elle. Seule, dans la langueur générale, elle garde une vertu agissante, sa mystérieuse énergie d’autrefois. Elle est restée un foyer d’âmes.

« Une forte disposition pour la vie intérieure, dit Ernest Renan, fut chez ma sœur le résultat d’une enfance passée dans ce milieu plein de poésie et de douce tristesse. » L’éducation y ajouta. Élevée dans une communauté religieuse, Henriette développa