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Argoat, cependant, offrait son bras à une vénérable ribaude ; les garçons d’honneur en faisaient autant. Inoubliable farandole ! Faute de souffle, quand la danse s’arrêtait, les bardes, pour remplir les entr’actes, déclamaient quelques-uns de leurs gwerz ou de leurs sônes les plus touchants. Plusieurs étaient accourus de loin pour ce mariage de leur confrère : Jaffrennou-Taldir (front d’acier), Berthou-Alc’houéder-Tréger (l’alouette du Trégor), le barde-facteur Charles Rolland, Toussaint le Garrec, etc. Là encore, les époux n’avaient fait que reprendre une vieille coutume : les bardes avaient rang d’honneur dans les mariages de jadis, — sans doute, pense La Villemarque, en souvenir de leur ancien caractère sacerdotal. Les textes kymriques nous apprennent qu’au XIIe siècle ils bénissaient encore des unions ; Dafydd ab Gwylim fut marié de la sorte par son ami le barde Madoc Penvraz. C’est un rôle qui semble exclusivement dévolu à cette heure aux officiers de l’état civil. Mais le sentiment religieux n’y perd rien. Il est constant, sur presque toute l’étendue de la péninsule, que la première nuit des noces revient à Dieu, la seconde à la Vierge et la troisième au patron du mari ou à saint Joseph. À Scaër et en quelques autres paroisses, on allume au moment du mariage deux flambeaux de cire vierge, l’un devant le mari, le second devant la femme : le premier flambeau qui s’éteint désigne celui des époux qui doit s’en aller avant l’autre. Et celui-là ne se lient pas pour le plus malheureux…

C’est que la mort ici n’a rien de haïssable ; elle est présente et familière à tous et sa pensée est comme