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léphone et qu’à la fin Jeannine ait dit textuellement : « Allez-y, si ça vous fait plaisir ! » pour qu’elle se décide à devenir l’amie de Théo. Après, il n’y avait pas de raison à ce qu’il ne s’installât chez elle. Germaine aime la vie régulière. D’autre part, le retour de son mari à l’appartement n’est pas sans inconvénients pour Jeannine. Monsieur est redevenu exigeant. Monsieur demande que Madame se lève pour lui faire à déjeuner, que la femme de ménage lui range sa chambre comme ceci, que Julien lui cire ses bottes comme cela, que le téléphone soit à son entière disposition, que Jeannine ne descende pas la chienne une ultime fois à quatre heures du matin, faisant à elles deux un tapage infernal dans l’escalier, qu’on ne lui donne pas à lécher la rondelle qui bouche la bouteille de lait. Il n’est pas convenable non plus que sa femme reçoive tous ces hommes soi-disant d’affaires, le matin, habillée surtout de ses cheveux, le soir en culotte de cheval, pour les exciter ! Depuis qu’il est à la Mutual, il devient puritain et sermonneur. Ils se sont fâchés, il y a eu entre eux des mots vifs. Théo a tous les torts, d’autant plus qu’il est chaque mois en retard pour son chèque. Jeannine lui met sous le nez son carnet. Depuis l’affaire du coup de révolver — la balle a passé si près — il lui avait promis une augmentation et juré être sérieux. Et tout recommence !