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marie le franc

sale rosse à son amie. Depuis quelques instants, Jeannine a envie de puiser à sa gauche. Elle ne saurait dire pourquoi. Elle n’est l’objet de la part de M. Rougerat que d’une honorable proposition : celle de faire son portrait. Flatteuse aussi : le portrait de Mme Rougerat par son mari est au Luxembourg. Ils prennent rendez-vous pour dix heures, lundi prochain, à son atelier. Il faut qu’elle soit tentée, puisqu’elle ne se lève jamais avant midi.

— Au revoir, Maître, au revoir, Général, Monsieur le Consul. Good-bye, chérie, c’était cocasse comme tout, votre grande affaire. Théo est en bas avec son auto. Bien luné aujourd’hui. Je suis contente à cause de mes petits souliers. Sa poule va être obligée de rentrer à pied…


Cette « boîte » est le côté sérieux de la vie de Jeannine. Elle se construisait avec sa dot en l’an de guerre. Théo acquérait en même temps qu’une femme une profession : il devenait propriétaire-gérant d’un garage. Le bâtiment à peine terminé, la guerre éclate. Elle laisse les étages en l’air : il n’y a que le rez-de-chaussée de prêt. Théo part avec le premier contingent. Le contractor plante là les travaux. Jeannine se transforme. Elle est presque levée à onze heures du matin. Elle devient manageresse. Elle a quelques clients, de belles âmes, recrutés parmi ses connaissances de Hill-Park,