Page:Le Franc - Visages de Montréal, 1934.djvu/62

Cette page a été validée par deux contributeurs.
62
marie le franc

ciation qu’il a reçue à mon sujet, et demande des renseignements. Il y avait des mouchards, évidemment, Mademoiselle, à la soirée de Mme Vadeboncœur. Je ne vous aurais pas ennuyée de cette histoire si vous n’y étiez mêlée. Dans la lettre que m’a lue le consul, où je suis accusé de propagande allemande, votre nom est cité en toutes lettres et l’on vous prête des propos anarchistes.

Pauvre Mlle Lucienne-Petit bois sacré, préoccupée surtout du Symbolisme ! Elle n’y voyait plus clair. Ses yeux de velours avaient l’air de deux oiseaux ébouriffés dans son visage brun. Elle voulait aller trouver le consul, interroger Mme Vadeboncœur. Mais en face d’elle, rigide sur sa chaise, le prince mettait un doigt gris sur sa bouche scellée. C’est amicalement qu’il avait été prévenu. Il avait juré sur l’honneur de ne pas ébruiter l’histoire.

La cousine glissait au bord de son fauteuil, trouvait le moyen, à présent qu’il était retourné à son mutisme hautain et triste, de donner son opinion. Ah ! ils avaient affaire à des ennemis redoutables. Déjà, à San-Francisco, ils avaient reçu une communication semblable et, cette fois, c’était son propre nom qu’on accolait au nom fatal de Stépanovski. On les accusait, elle et l’Institut des Actualités, d’un but immoral. Et, cependant, l’on pouvait fouiller sa vie ! Elle avait dirigé pendant