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marie le franc

Je l’ai connu à Douvres. Il venait de recevoir la V. C. Après la guerre, il a repris sa profession et il dirige une usine de produits chimiques. J’espère bien que vous allez faire connaissance. Et mon petit Stephen… Vous verrez, he is a darling ! Je vais vous montrer son portrait.

Sa figure s’était animée. Annabel jeune fille transparaissait à travers le masque.

Je la suivis dans l’autre pièce. Une lampe voilée de mauve était allumée sur la table de chevet qui séparait les lits jumeaux larges et bas dont la couverture était faite. Annabel, un trousseau de clés à la main, se pencha sur une valise posée sur un tabouret. Elle s’efforçait de lire, en les approchant de son visage, à la hauteur de ses yeux, les étiquettes des petites clés brillantes qu’elle se mit à essayer l’une après l’autre. Ne réussissant pas à ouvrir, une expression d’angoisse passa sur ses trait, et elle me regarda, l’air indécis, avant de s’avancer vers la sonnette sur laquelle elle appuya longuement en pensant à autre chose, la nuque courbée sous le nuage lourd de ses cheveux.

Une femme de chambre parut, lui prit les clés des mains et du premier coup ouvrit la valise.

There you are, Madam !

Annabel regardait dans sa direction avec un demi-sourire, continuant à passer lentement la main sur sa nuque.