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visages de montréal

couronnait de bardeaux qu’ébranlaient en été le trottinement feutré des écureuils, en hiver la plainte musicale de la neige, et l’automne la mélopée des longues pluies convoyées par l’attelage rouge des feuilles d’érable, quand la maison pleurait ses absents.

Saint-Loup n’avait pas touché au rez-de-chaussée qui avait encore sa salle aux solives chatouillées de fumée, sa chambre au papier moisi où s’étaient succédé les bers normands, picards, poitevins ou bretons et les lits en bois d’érable des générations qui avaient vécu là. Il s’était contenté de hausser le toit d’un coup d’épaule et de tracer dessous des cellules où, sur le plancher tapissé d’odorante poussière, attendaient à l’intention d’hôtes élus au passage le cadre de lit, le pot à eau, l’éclat de miroir qui meublaient chacune, et ce qu’il restait d’une bougie rongée par les souris des champs. On courait tout de suite à la petite fenêtre à quatre carreaux pour toucher des yeux la forêt penchée.

Ce qui frappait dans cette maison était qu’elle fût si petite. L’œil allait d’elle au grand louvetier qui en était le propriétaire et eût pu l’agrandir à sa taille. Il y avait dans l’humilité de la cagna, dans son air penchant, dans son fumet de pétrin et de huche, quelque chose sans doute qui répondait à un instinct paysan, à un flair de chasseur,