Page:Le Franc - Visages de Montréal, 1934.djvu/171

Cette page a été validée par deux contributeurs.
171
visages de montréal

mène ses guêtres blanches. Ils parlent haut, latinisent l’atmosphère du nord. La neige leur envoie des bourrades qui les animent. Se chamailler est une façon de se dire bonsoir avant de se séparer. Homère agite sa canne dans la direction du dernier autobus qui lui permettra de rejoindre son faubourg agrémenté d’absurdes cheminées d’usines. Le lévrier racé regagne à pied son logis, insinuant sa longue et mince silhouette entre les zébrures de la neige.

Le jeune homme à pelisse d’ours accompagne les deux amies. Il toussote en allumant une cigarette. Qu’est-ce qu’il va devenir, lâché par les compères, entre ces deux gentilles viragos ? Il ne désarme pas cependant. Le vent mouillé donne l’exemple de l’escarmouche. Il a le désir de les provoquer. Ce timide incline à trouver Marie-Louise guindée. Il se rencontre sans le savoir avec Lurcain qui tout à l’heure rêvait d’un visage qui vous heurte comme une proue aiguë dans les eaux sournoises de l’inconnu. Il désigne la porte tournante du Ritz qui fait de ceux qu’elle happe des fantoches, cette porte où le grand homme a disparu, et il reprend d’un ton doux, l’œil en coin, l’exclamation des camarades : « Quelle touche, vous ne trouvez pas ? » Il est content. Il ronronne dans sa pelisse : il a pris position.

Marie-Louise, celle qu’on ne peut faire sortir de