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qui lui était habituel, et le geste mécanique de son corps plié en deux révéla qu’il avait considérablement maigri.


Nous nous étions donc quittées là, au bord du trottoir, ou plutôt au bord d’un océan, il y a dix ans, et je n’avais plus entendu parler de Florence. Il avait fallu me retrouver par hasard sur la colline de Pleasant View pour que son souvenir revînt, et le besoin impérieux de la revoir. Dans les quelques minutes que je mis à descendre la rue, tous les aspects de Florence avaient défilé sous mes yeux.

Ils me conduisirent à sa maison. Je sonnai. Une jolie fille moulée dans son uniforme empesé de nansouk bleu de lin, tout pareil à celui que les servantes portaient autrefois chez Florence, vint ouvrir. Le nom que je cherchais désespérément se présenta à cet instant même pour me tirer d’embarras, et je pus demander si Mrs K. était chez elle. De la surprise passa sur son visage rose. « Mrs K. n’habite plus ici. La maison a été vendue à la mort de son mari. » Et voyant mon expression elle ajouta : « Oui, on l’a trouvé mort dans son garage. Mrs K. est allée habiter chez son père, en face. »

Je respirai. Du moment que rien n’était arrivé à Florence !